THIEYSENEGAL.com : Le départ d’Ousmane Diagne du ministère de la Justice dans le cadre du remaniement gouvernemental annoncé samedi continue d’alimenter les débats. Parmi les réactions les plus virulentes, celle de Ibrahima Hamidou Dème, ancien magistrat devenu acteur politique, a particulièrement retenu l’attention.
Dans une publication sur sa page Facebook, Dème, souvent surnommé « Juge Dème », a accusé le parti PASTEF d’avoir pris le contrôle de la Justice avec des intentions qu’il qualifie de « dangereuses pour la démocratie ».
« Insatisfaits de la domestication de la justice pénale et de la mise en berne des libertés publiques, les extrémistes du Pastef se sont dotés, avec le remaniement d’hier, des armes du crime pour tuer la démocratie et l’État de droit. Tout le monde doit en être conscient », écrit-il.
Un changement de profil au ministère de la Justice
Yacine Fall, ancienne ministre de l’Intégration africaine et figure montante de PASTEF, succède à Ousmane Diagne à la tête du ministère de la Justice. Ce dernier, ancien procureur général, était régulièrement accusé par des militants et cadres de PASTEF de laxisme dans le traitement des dossiers sensibles, notamment ceux liés à la répression des manifestations entre 2021 et 2023.
L’éviction d’Ousmane Diagne est interprétée par certains comme une manœuvre politique, visant à aligner le ministère sur les orientations de la majorité actuelle. D’autres y voient une tentative de rupture avec l’héritage judiciaire du régime précédent, notamment en ce qui concerne la chaîne pénale et la détention préventive prolongée.
Un discours accusatoire qui divise
Les propos de Dème, bien que virulents, ne sont pas nouveaux dans son positionnement politique. Ancien président du parti Ensemble, il s’est régulièrement exprimé contre ce qu’il considère comme une mainmise politique sur les institutions républicaines.
Toutefois, le ton employé – évoquant des « armes du crime » pour « tuer la démocratie » – a suscité des réactions mitigées. Certains y voient une alerte légitime sur la nécessité d’une séparation des pouvoirs, d’autres dénoncent une rhétorique alarmiste qui ne repose pas sur des faits concrets depuis la prise de fonction du nouveau gouvernement.
Du côté de PASTEF, aucune réaction officielle n’a été enregistrée, mais des voix proches du parti ont dénoncé sur les réseaux sociaux une instrumentalisation politique d’un départ attendu et une tentative de discréditer la réforme judiciaire en cours.
Le ministre sortant, Ousmane Diagne, avait déjà exprimé en avril 2025 à l’Assemblée nationale son refus catégorique de toute pression politique sur le pouvoir judiciaire. Il avait notamment déclaré :
« Je n’ai jamais accepté qu’on fasse pression sur moi, surtout dans un sens déterminé. Qu’on ne compte pas sur moi pour exercer la moindre pression sur les magistrats du siège. Je n’ai aucune autorité sur eux ».
Ces propos avaient alors provoqué des grincements de dents chez certains partisans de PASTEF, qui réclamaient des actions judiciaires rapides dans des dossiers sensibles, y compris à l’encontre d’anciens responsables du régime Macky Sall.
Ce changement à la Justice intervient dans un climat où la réforme de l’appareil judiciaire est présentée comme une priorité par le tandem Diomaye–Sonko. La nomination de Yacine Fall, réputée pour son engagement en faveur des droits humains et de la transparence, est perçue par certains comme une volonté d’impulser une nouvelle dynamique.
Mais les tensions internes et les suspicions persistantes quant à une possible politisation du secteur judiciaire montrent que le gouvernement devra gagner la confiance à la fois des citoyens et des acteurs institutionnels.
La rédaction de THIEYSENEGAL.com