Sadio Mané, de la légende à la controverse : une mémoire sélective du football sénégalais ?
THIEYSENEGAL.com : Il fut l’homme d’un peuple, le héros d’une nuit inoubliable à Yaoundé. Le 6 février 2022, Sadio Mané entrait dans la légende en offrant au Sénégal sa toute première Coupe d’Afrique des Nations (CAN). Trois ans plus tard, le contraste est saisissant. Le joueur, jadis porté en triomphe, subit aujourd’hui une vague de critiques, parfois virulentes, sur les réseaux sociaux et dans une partie de l’opinion publique.
Certains lui reprochent des prestations jugées en dessous de son niveau habituel en sélection, d’autres vont jusqu’à remettre en cause son engagement, voire sa place dans le groupe. Un renversement de perception qui interroge : le Sénégal a-t-il perdu le sens de la reconnaissance envers l’un de ses plus grands ambassadeurs ?
Une trajectoire hors du commun
Né à Bambali, dans le sud du pays, Mané incarne l’ascension par le mérite. Révélé à Metz, affûté à Salzbourg, puis révélé au monde à Southampton et surtout Liverpool, il a gravi les échelons du football mondial avec humilité et constance. Champion d’Afrique, finaliste de la Coupe du monde des clubs, vainqueur de la Ligue des champions et de la Premier League, il a été Ballon d’Or africain à deux reprises, en 2019 et 2022.
Mais au-delà de ses performances en club, c’est en équipe nationale que son aura s’est réellement ancrée dans le cœur des Sénégalais. Toujours disponible pour les Lions de la Teranga, souvent blessé ou diminué, Mané n’a jamais décliné une convocation, privilégiant le drapeau à sa carrière personnelle.
La critique, symptôme d’un oubli ?
L’érosion de l’admiration semble aujourd’hui alimentée par une série de matchs en demi-teinte, une baisse d’influence sur le terrain, ou encore un transfert jugé peu convaincant vers Al Nassr, en Arabie Saoudite, après une saison difficile au Bayern Munich. Pour certains supporters, ce choix de carrière a terni l’image de l’icône, l’éloignant du football de haut niveau.
Mais ces critiques prennent-elles en compte le poids des années, l’usure du corps et des attentes toujours plus élevées ? Mané, 33 ans en avril prochain, demeure un cadre du vestiaire, un leader naturel, un lien générationnel entre les anciens et les nouveaux.
« Les footballeurs ne sont pas des machines. On ne peut pas exiger d’eux une forme éternelle sans leur accorder le droit au doute ou à la transition », rappelle un journaliste sportif sénégalais.
La reconnaissance, une denrée rare ?
La polémique qui entoure aujourd’hui Mané reflète aussi une culture sportive encore fragile face à la notion de mémoire collective. Dans d’autres pays, les légendes sont protégées, valorisées, intégrées durablement aux projets sportifs ou institutionnels. Au Sénégal, certains craignent qu’une mémoire courte n’efface trop rapidement les héros d’hier, une fois les projecteurs éteints.
Dans un contexte où la sélection nationale est en pleine reconstruction après une CAN 2023 mitigée, et à l’approche des qualifications pour la Coupe du monde 2026, le rôle de Mané reste crucial, même s’il évolue. Il n’est peut-être plus le finisseur décisif de 2022, mais il peut incarner le guide expérimenté, le moteur du vestiaire, le transmetteur d’héritage.
La rédaction de THIEYSENEGAL.com