Cinglant désaveu de la Cour suprême au ministre de la Communication : L’arrêté suspendant les médias de Public SN annulé

0

THIEYSENEGAL.com : Dans une décision qui fera date dans les annales judiciaires et médiatiques du Sénégal, la Cour suprême a suspendu, par son ordonnance 16/2025 rendue publique ce lundi 16 juin, l’arrêté controversé du ministre de la Communication, des Télécommunications et du Numérique, enjoignant la cessation des activités des médias du groupe Public SN.

L’arrêté ministériel N°0011059/MCTN du 22 avril 2025 visait directement Public SN TV, le quotidien Le Public et le site public.sn, dirigés par la journaliste Aïssatou Dio Fall, invoquant des motifs de non-conformité au Code de la presse. Or, le juge des référés de la Cour suprême, dans une décision motivée, a jugé cet acte administratif disproportionné, illégal et attentatoire à la liberté de la presse.

Ce revers judiciaire infligé au ministère marque une étape importante dans la défense des libertés fondamentales au Sénégal. La suspension de l’arrêté est perçue comme un signal fort contre les velléités de musellement des médias, dans un climat tendu depuis l’avènement du nouveau pouvoir en mars 2024.

En effet, cette ordonnance intervient dans un contexte de tension persistante entre la presse privée et l’État, exacerbé par des mesures économiques et fiscales jugées hostiles : annulation des remises fiscales, gel des subventions publiques 2024–2025, résiliations unilatérales de contrats publicitaires, et hausse des coûts de diffusion sur la TNT, ayant déjà conduit à l’interruption de plusieurs chaînes privées.

Selon des sources au sein du Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse du Sénégal (CDEPS), plus d’une dizaine d’entreprises de presse seraient aujourd’hui au bord de la faillite. Les dettes s’accumulent auprès des fournisseurs, de l’administration fiscale, de la sécurité sociale et surtout des employés, dont des centaines ont déjà été licenciés ou sont sans salaires depuis plusieurs mois.

Les syndicats des professionnels des médias, notamment le SYNPICS, annoncent des actions de grève imminentes pour dénoncer l’asphyxie orchestrée, selon eux, contre le pluralisme médiatique.

Alors que le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye avait lancé plusieurs appels à l’apaisement, notamment lors des Conseils des ministres du 13 août 2024 et du 7 mai 2025, les décisions concrètes tardent à suivre. La presse privée, qui a largement contribué aux trois alternances démocratiques dans le pays, interpelle l’État sur la nécessité de préserver son indépendance, au risque de sombrer dans une instabilité structurelle.

L’ordonnance de la Cour suprême ne se limite pas au cas de Public SN. Elle rappelle, en creux, les limites de l’intervention de l’Exécutif dans les questions relevant de la liberté d’expression. Elle impose également un cadre de rigueur dans l’application du Code de la presse, afin d’éviter toute dérive liberticide.

Cette décision constitue un précédent juridico-politique, posant les bases d’un nécessaire rééquilibrage entre autorité étatique et indépendance médiatique, dans un pays qui se veut modèle démocratique en Afrique de l’Ouest.

La rédaction de THIEYSENEGAL.com 

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.