Ciré Clédor Ly met en garde : « Le pouvoir est pris, mais il n’est pas pleinement exercé »

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THIEYSENEGAL.com : Dans un discours percutant livré ce week-end à Dakar, Maître Ciré Clédor Ly, ténor du barreau sénégalais et défenseur de longue date des droits civiques, a lancé une alerte sans équivoque à l’endroit des nouvelles autorités issues de l’élection présidentielle du 24 mars dernier. Pour lui, la révolution enclenchée par les urnes reste inachevée, tant que les piliers de l’ancien système n’auront pas été démantelés.

« La justice doit être une lance de fer dans un fourreau d’acier », a-t-il martelé devant un public attentif, reprenant une image guerrière pour insister sur la nécessité de construire une justice forte, rigoureuse et indépendante. Dans son viseur : les magistrats et procureurs qui, selon lui, ont contribué aux dérives autoritaires du régime déchu, sans jamais répondre de leurs actes.

L’avocat, connu pour ses prises de position tranchées, n’a pas mâché ses mots. Il accuse ouvertement une partie de l’administration actuelle d’être aux ordres d’un système ancien, qualifiée de « compradore », un terme lourd de sens désignant une élite alignée sur des intérêts extérieurs et opposée à toute transformation profonde.

Plus encore, il évoque une « contre-révolution » en marche, alimentée selon lui par une cinquième colonne agissant de l’intérieur du pays mais également relayée depuis l’Hexagone, où il affirme que des manœuvres hostiles seraient en préparation.

« Le temps presse, les ennemis de la rupture s’organisent méthodiquement », a-t-il averti, appelant à une réaction offensive plutôt que défensive de la part du gouvernement.

Ciré Clédor Ly ne se contente pas de dénoncer : il propose. Il appelle à une véritable épuration de la magistrature, un mot rare dans le lexique institutionnel sénégalais. Pour lui, l’impunité persistante des responsables des abus du passé – emprisonnements politiques, détentions arbitraires, répression sanglante – mine la crédibilité de l’État de droit promis par le nouveau pouvoir.

« Une justice faible est une justice de compromission », déclare-t-il, rappelant que la légitimité révolutionnaire doit s’accompagner de réformes systémiques, sans quoi elle ne sera qu’un vernis réformiste voué à l’échec.

À l’approche des 200 jours de gouvernance du président Bassirou Diomaye Faye et de son Premier ministre Ousmane Sonko, Me Ly adresse un message sans détour : le pouvoir est légitime, mais il doit être pleinement assumé. Selon lui, les artisans de la rupture – anciens prisonniers politiques, militants de la société civile, acteurs du mouvement du 17 mars – doivent désormais participer activement à la conduite de l’État.

« Les commandes doivent être confiées à ceux qui ont donné de leur liberté et de leur sang », a-t-il plaidé, dans une allusion claire à ceux qui ont subi la répression entre 2021 et 2024.

Alors que le Sénégal tente de refermer le chapitre douloureux de trois années de crise marquées par des violences étatiques, des morts en marge de manifestations, et des centaines d’arrestations, l’intervention de Ciré Clédor Ly résonne comme un appel à la cohérence historique et à l’audace politique.

« La justice censée incarner le nouvel ordre reste sous le contrôle de l’ordre renversé », conclut-il, appelant à accélérer la cadence des réformes et à rompre définitivement avec les logiques d’héritage et de continuité.

La rédaction de THIEYSENEGAL.com

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