Début avril, Abdoulaye Bathily, 71 ans, dénonçait le parrainage jugé anti-démocratique et s’exposait à la colère des partisans de Macky Sall. Début mai, le professeur et conseiller spécial du Secrétaire général de l’Onu s’envolera «immédiatement» à Madasgacar, pour une énième mission de paix.
Abdoulaye Bathily, ancien ministre conseiller et fonctionnaire international, en avait surpris plus d’un, en s’attaquant, début avril, à la loi sur le parrainage portée par le gouvernement sénégalais. Les mauvaises langues avaient vite fait alors de conclure à un appel du pied à Macky Sall, d’autant plus que le professeur admettait lui-même, n’avoir plus revu le Président depuis un an. La décision sortie hier de l’envoyer «immédiatement», comme envoyé spécial dans la crise politique malgache, devrait arrondir les angles d’une collaboration rendue rugueuse depuis la candidature malheureuse de Bathily, 71 ans, au poste de président de la Commission de l’Union Africaine. Un strapontin qui aurait consacré une carrière dédiée à la diplomatie internationale depuis 2013.
Avant l’accession de Macky Sall à la présidence sénégalaise, Abdoulaye Bathily, c’est essentiellement une carrière politique. Après 2012, le professeur d’histoire est propulsé dans la diplomatie internationale, avec une première nomination comme Représentant spécial du Secrétaire général de l’Onu au Mali. Il dirige la Mission multidimensionnelle intégré des Nations unies pour la stabilisation du Mali (Minusma), dans un contexte où le pays est en proie aux attaques terroristes dans le nord. Une première expérience qui lui ouvre, quelques mois après, les portes d’une deuxième mission où, cette fois, Ban Ki-moon lui laisse les rênes. Après le Mali, Bathily est donc envoyé en Centrafrique pour succéder au Tchadien, Abou Moussa, à la tête du Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale. La communauté internationale qui prévoit l’envoi de 12 000 casques bleus, compte sur l’expérience et la connaissance de la politique africaine de Bathily pour installer durablement la paix, avec une approche globale de la gestion de la crise centrafricaine, pour pousser le Président autoproclamé, Michel Djotodjia, à la démission en janvier 2014. En juin 2015, l’universitaire succède à l’Algérien Saïdi Djinnit, récusé par l’opposition, au poste de facilitateur dans la crise burundaise. On place alors beaucoup d’espoir en lui, mais à sa prise de fonction en juillet, Bathily commet une erreur qui compromet irrémédiablement ses talents de médiateur dans cette partie de l’Afrique. Les partisans du Président Pierre Nkurunziza mettent en doute son profil, parce qu’à son arrivée, il n’a pas pris langue avec «les hautes autorités du Burundi». Dans ses fonctions de chef de l’Unoca, il travaille à la résolution de nombreux conflits armés et à la gestion des crises post-électorales dans la Sous-région. Des missions qui le conduisent à voir plus grand. En octobre 2016, deux mois avant la fin de son mandat, Abdoulaye Bathily décide de démissionner pour se consacrer à sa candidature à la tête de la Commission de l’Union africaine portée par le gourvernement sénégalais et ses alliés. Il échoue au pied du podium et se consacre désormais à ses consultances jusqu’en avril 2018 où son nom apparaît dans une enquête de Afriqueconfidentielle.com sur la corruption en Afrique. «L’homme qui avait compromis les chances de son pays de prendre la présidence de la Commission de l’Ua, traîne des casseroles de son passage en Afrique centrale, notamment au Gabon et au Congo où il avait exercé en tant qu’envoyé de l’ancien secrétaire général de l’Onu», écrit le site. Il y a quelques semaines, il opère une sortie politique dans l’émission Grand jury où il décrie l’affaire Khalifa Sall et le parrainage, deux dossiers épineux pour le Président Macky Sall. Ce qui lui a peut-être valu d’être éloigné du Sénégal pour une mission en Madagascar. «Immédiatement».
AICHA FALL
