Farba Ngom hospitalisé mais toujours détenu : la défense crie à une « détention injustifiée » malgré l’avis médical
THIEYSENEGAL : Le cas de Farba Ngom, maire des Agnams et ancien député, prend une nouvelle dimension judiciaire et médiatique. Alors que son état de santé a été jugé incompatible avec la détention par plusieurs expertises médicales, la chambre d’accusation a confirmé, ce mercredi, le maintien de son mandat de dépôt, tout en ordonnant son hospitalisation dans un centre de santé spécialisé. Une décision paradoxale que ses avocats dénoncent avec force, évoquant une « séquestration médicale » contraire au droit.
Interrogé par L’Observateur, Me Baboucar Cissé, avocat de la défense, a annoncé un pourvoi en cassation devant la Cour suprême. Il s’agit, selon lui, de corriger une « erreur judiciaire manifeste ».
« La chambre devait lever le mandat de dépôt. Elle a préféré une décision hybride : hospitalisation sans liberté. C’est une mesure sans fondement juridique au regard des expertises », soutient Me Cissé.
L’avocat s’appuie sur deux arrêts rendus le 1er août 2025 (n°55 et 56), dans lesquels la chambre d’accusation elle-même exigeait une contre-expertise médicale avant de statuer sur la demande de liberté. Or, celle-ci a été effectuée — par des médecins désignés par la justice — et leurs conclusions confirment celles de l’expertise initiale : l’état de santé de Farba Ngom n’est pas compatible avec la détention carcérale.
« À partir du moment où l’expertise confirme l’inaptitude, la seule conclusion possible est la levée du mandat. Ne pas le faire revient à contourner le droit et à enfermer un malade », déplore Me Cissé.
Farba Ngom, proche de l’ancien président Macky Sall, est poursuivi dans une affaire dont les détails restent confidentiels. Toutefois, le maintien de sa détention malgré les constats médicaux fait ressurgir les accusations récurrentes d’instrumentalisation de la justice à des fins politiques.
Un proche du dossier, sous couvert d’anonymat, parle d’« une décision à mi-chemin entre humanisation et punition ».
« Il est hospitalisé, certes, mais reste sous le coup d’un mandat de dépôt. C’est un lit médical sous surveillance carcérale. »
Cette position inconfortable renforce la conviction de la défense que l’affaire dépasse les considérations strictement juridiques.
Une séquestration sous couvert de soin ?
Les avocats dénoncent un paradoxe juridique : d’un côté, la justice reconnaît la nécessité d’un traitement médical spécialisé, de l’autre, elle refuse la liberté provisoire qui permettrait une prise en charge libre.
« C’est une privation de liberté maquillée. Farba Ngom est un malade, pas un fugitif », martèle Me Cissé.
En attendant l’examen du pourvoi, Farba Ngom reste hospitalisé mais sous contrainte carcérale, une situation inédite et controversée. La défense, qui évoque une possible violation des engagements internationaux du Sénégal en matière de droits humains, pourrait également porter l’affaire devant les juridictions régionales.
Ce dossier remet sur la table le débat sur le traitement des détenus malades, une question régulièrement soulevée dans les milieux juridiques et humanitaires. En 2023 déjà, plusieurs organisations de la société civile avaient alerté sur les conditions de détention de prisonniers politiques et d’opinion, appelant à une réforme urgente du système pénitentiaire.
Le recours devant la Cour suprême pourrait ainsi devenir un test juridique mais aussi un moment charnière pour l’indépendance de la justice sénégalaise.
La rédaction de THIEYSENEGAL.com