Litige financier autour de Greentech Sénégal : Hapsatou Sy assignée en justice par la maison-mère française
THIEYSENEGAL.com : Un différend aux relents de rupture d’alliance économique secoue la sphère entrepreneuriale franco-sénégalaise. La société française Greentech SA, spécialisée dans les biotechnologies végétales, a officiellement assigné en justice sa filiale sénégalaise, Greentech Sénégal SA, ainsi que sa présidente Hapsatou Sy, devant le tribunal de commerce de Dakar, selon les informations du journal Libération. L’audience, initialement évoquée le 2 juin 2025, a été renvoyée au 23 juin prochain.
L’affaire trouve son origine en 2021. À cette date, Hapsatou Sy, entrepreneure franco-sénégalaise médiatisée et engagée dans des projets de valorisation des ressources africaines, noue un partenariat avec Jean-Yves Berthon, président de Greentech SA. Cette collaboration donne naissance, le 24 juin 2022, à Greentech Sénégal SA, une structure à vocation industrielle censée accompagner le développement de la bioéconomie au Sénégal.
Greentech SA détient 72 % du capital de la filiale, tandis qu’Hapsatou Sy en possède 24 % et en assure la présidence. L’objectif affiché : implanter une usine de production à Diamniadio, créer des emplois, et établir une filière innovante autour des ressources naturelles locales.
D’après les documents judiciaires relayés par Libération, la maison-mère affirme avoir injecté 1,72 million d’euros, soit environ 1,13 milliard de francs CFA, dans ce projet. Ces fonds auraient été alloués à diverses dépenses : installation des locaux, achat de matières premières, acquisition de terrain, études de marché, séminaires et formations techniques.
Cependant, à ce jour, aucune activité n’est opérationnelle, et l’usine de Diamniadio n’a jamais vu le jour. Pire encore, selon un état des droits réels daté du 7 janvier 2025, consulté auprès du Conservateur de Rufisque, le terrain censé accueillir l’usine appartient toujours à l’État sénégalais, par le biais de la Direction générale du patrimoine de l’État (DGPU).
Greentech SA affirme par ailleurs avoir versé 353 000 euros supplémentaires à Hapsatou Sy pour des frais liés à l’acquisition du terrain et à des études architecturales. Or, aucun acte de propriété, ni rapport financier détaillé n’aurait été fourni par la présidente de la filiale.
Face à ce qu’elle qualifie de « manque total de transparence », la société mère réclame une expertise judiciaire indépendante. Elle souhaite que soient évalués les actifs réels de Greentech Sénégal, et que soient vérifiés les écarts éventuels entre les montants déboursés et les dépenses effectivement engagées.
Plus grave encore selon Greentech SA : aucune présentation des comptes n’a été faite depuis la création de la société, malgré de multiples relances écrites adressées à Hapsatou Sy.
Une défense musclée de Hapsatou Sy
En réaction, Hapsatou Sy rejette catégoriquement les accusations. Selon elle, Jean-Yves Berthon aurait volontairement abandonné le projet, mettant en difficulté les équipes locales qu’elle avait mobilisées.
« Ce projet a été saboté par la maison-mère, qui a préféré couper les vivres en pleine phase de développement », aurait-elle déclaré à son entourage, selon des sources proches du dossier.
Elle affirme par ailleurs que son implication était motivée par une volonté sincère de dynamiser l’entrepreneuriat industriel au Sénégal et que les accusations actuelles relèvent d’une tentative de lui faire porter un échec collectif.
Ce contentieux met en lumière les risques liés aux partenariats transnationaux déséquilibrés et soulève des questions de gouvernance, de transparence et de sécurisation des investissements dans l’espace ouest-africain.
Alors que l’audience est prévue pour le 23 juin 2025, tous les regards sont désormais tournés vers le tribunal de commerce de Dakar, qui devra démêler les responsabilités dans ce litige à fort retentissement, mêlant capital étranger, ambition industrielle, et figures publiques.
La rédaction de THIEYSENEGAL.com